Voilà où conduisent parfois les échangent sur Twitter !
De gazouillis en gazouillis, Lucie (@LucieGillet) a bien voulu partager sa réflexion sur l’entrée dans l’écrit en maternelle : elle met ici en lien pratiques pédagogiques, recherche et numérique. Elle s’inspire de la trame d’un diaporama publié sur Maternailes, pour travailler l’entrée dans l’écrit.
**
Le diaporama sur lequel nous avons travaillé a été visionné au TBI lors de séances collectives décrites ci-après. « Pomelo » en est le personnage central.
Ce diaporama a été adapté en e-book pour une utilisation en binome sur tablette tactile (Ipad), pour des activités de réinvestissement.
Dans son ouvrage, Le rapport à l ‘école des élèves de milieux populaires (2013), J. Bernardin montre que les enfants qui réussissent à l’école sont ceux qui ont construit une « posture cognitive seconde » : ceux qui savent effecter le « décrochage » sur les apprentissages, pour lui c’est l’enjeu de toute l’école que de faire accéder tous les élèves à cette « socialisation intellectuelle ». Cela se joue évidemment dès la maternelle et le parcours proposé ici essaie de faire ces allers-retours entre le « je fais » / « je réfléchis sur mon activité ».
Lors de cette conférence et dans ses travaux, André Ouzoulias évoque le parcours des élèves faibles lecteurs, il relève 7 obstacles à éviter… Nous postulons qu’un outil tel que ce diaporama aide les élèves à lever les malentendus du premier obstacle et participe à ce qu’ils se constituent une « bonne » représentation de ce qu’est l’acte de lecture.
Ce diaporama est introduit dès le début de l’année pour amorcer nos séances liées aux productions d’écrit. En parallèle nous menons également des activités de phonologie telles celles décrites par Roland Goigoux et Sylvie Cèbe dans Phono. Mais il nous semble important de mener de front les deux objectifs (prise de conscience des réalités sonores de la langue et découverte du fonctionnement du code écrit).
Je ritualise la séance en expliquant que sur ce créneau chaque semaine nous travaillerons à « apprendre des choses » qui seront utiles pour comprendre comment fonctionnent la lecture et l’écriture. Que bien sûr ils ne vont pas savoir lire tout seuls « comme les grands » à l’issue des séances, mais que tout ce qu’on va comprendre là va les aider à construire ce dont ils auront besoin. J’explique qu’apprendre ça ne vient pas tout seul et que c’est parce qu’on réfléchit et se pose des questions tous ensemble que chacun peut après comprendre « dans sa tête » et petit à petit savoir tout seul.
(NB. C’est aussi quelque chose que je dis dans d’autres contextes, la nécessité de réfléchir, de revenir sur son action etc).
Je crois que pour que les enfants s’impliquent dans leur apprentissage, il faut leur montrer qu’on attend d’eux qu’ils s’impliquent… et que cette implication s’apprend. J. Bernardin montre qu’elle ne va pas de soi, en particulier pour les enfants les plus éloignés de la culture scolaire, ceux qui ont justement besoin de l’école pour la construire. C’est en ce sens que le diaporama est un outil. C’est une situation où on montre aux élèves qu’on attend d’eux qu’ils réfléchissent face à l’écrit, qu’il y a des distingos subtils à faire.
Lors de la première séance, on ne va pas forcément au bout du diaporama (selon les discussions avec les élèves, comment ils sont réceptifs), c’est aussi l’occasion d’apprendre les termes techniques qui nous serviront par la suite et parallèlement (toujours…) en production d’écrit : la majuscule, le point, les espaces entre les mots.
On apprend à parler « précis » : la fonction de l’illustration, du texte composé par l’écriture. Que la phrase est composé de mots séparés par les espaces, que chaque mot est constitué de lettres…
Ce diaporama est présenté comme un jeu des différences, il faut trouver ce qui n’est pas « pareil » que la page précédente, jouer avec le plaisir des blagues de l’enseignant-e qui a caché des choses pour que les élèves comprennent. C’est assez euphorique comme moment !
Un enjeu double donc : entrer dans l’apprentissage de la lecture, mais entrer surtout dans un rapport scolaire à l’usage de la lecture, apprendre à faire des retours sur, à mettre en relation.
Ce diaporama est donc volontairement non sonorisé (d’autres collègues font un autre choix, ayant d’autres objectifs) pour que les élèves réfléchissent sur le matériau écrit. Il est par contre évident que tout est oralisé au cours de la recherche commune avec eux.
La sonorisation ouvre d’autres pistes en particulier pour illustrer la segmentation de la chaîne orale parlée en unités-mots. Ce pourrait faire l’objet d’une séance de travail avec les élèves d’ailleurs.
Enfin cet outil fait partie de la mémoire collective du groupe classe, il est « convoqué » en rappel quand on débute une séance de production d’écrit. Il sera revisionné plusieurs fois dans l’année pour que les élèves qui n’ont pas tous la même aisance face à ces concepts difficile d’accès en début d’année puissent y revenir.
Lucie Gillet
**
Notes de Christine : En prolongement, nous avions réalisé avec les moyens et les grands de ma classe un petit livre A4 sur l’axe de cette phrase en insérant les prénoms et les photos d’enfants.
Merci aux twitamis @LucieGillet bien sûr, mais aussi @Maritouit @Vairaunik et tous les autres.
Très intéressant!
Maitre sup, je travaille en ce moment avec les GS sur la segmentation de l’énoncé oral en mots, et sur la segmentation des mots en syllabes, et je vois comme cet apprentissage est compliqué, l’abstraction et la maitrise de ce langage spécifique que ça nécessite.
Très intéressant. Merci.