Christine, en MS/GS

Nous sommes le 22 septembre 2006, soit à peine trois semaines après la rentrée. 15 ans de métier, dont 10 ans de brigade départementale, mais je débute en maternelle, avec 28 enfants de MS-GS.

J’ai longuement réfléchi à la mise en oeuvre des ateliers échelonnés ayant d’emblée décrété que si pour ma première année, je n’innovais pas, je n’aurais jamais le courage de remettre en question mes pratiques au bout de 2-3 ans. Alors, j’ai mis en place, au début progressivement (pour me rassurer), en conservant plus ou moins les traditionnels accueils et rituels pour ne pas trop « choquer » parents et enfants. L’horreur ;))))

Ça fonctionnait, mais très mal, je pressentais fort bien le potentiel de cette organisation différentielle sans pouvoir l’expérimenter jusqu’au bout.

Alors j’ai re-changé, ai mis en place les ateliers dès l’accueil, ai expliqué mais seulement aux parents, parce que les enfants ont adhéré tout de suite, la « liberté » et le « pouvoir » (relatif et dosé) d’agir sur leurs apprentissages leur convenant parfaitement.

(J’ai été très agréablement sidérée de constater la réaction des enfants après quelques jours de succès de la mise en place des ateliers; certains polissons chroniques sont tellement absorbés qu’ils en oublient d’être polissons, certains enfants très « scolaires » affichent une grande timidité pour intégrer les activités, sans doute l’insécurité relative les met mal à l’aise. Ce qui est sûr, c’est que mettre en place les activités dès l’accueil permet une concentration quasi immédiate des enfants, ce que je ne pouvais pas obtenir après 15-20 minutes d’accueil, de jeux, de cris, d’excitation généralisée…)

Et ce fut le succès, le pur plaisir d’enseigner (Nous enseignons, mais Eux, qu’apprennent-ils?), le bonheur d’une classe en travail pendant plus d’une heure sans même réaliser le temps qui passe.

Les rituels sont déplacés vers 9h45 – 10 h mais quelle importance? Je suis une maîtresse atypique (dans l’école) et comblée qui se fait « gronder » quand elle interrompt une activité pour cause d’horaire (Moi: Ah, vite, il faut ranger, c’est l’heure des mamans! Eux: Mais maîtresse, on n’a pas fini ! ! ! )

Beaucoup de travail à effectuer encore pour parfaire l’organisation matérielle, bcp de réflexion pédagogique, bcp de recherche d’activités appropriées, bcp de constats de réussites ou d’échecs dans la mise en oeuvre des activités, mais que de riches moments de classe en perspective…

ET quand j’explique aux parents que cela ne présente aucun intérêt de gratifier le travail de l’enfant du traditionnel 🙂 ou 🙁 mais que je m’attache davantage aux raisons d’un échec pour aider l’enfant à progresser, les inquiétudes légitimes des parents fondent.

Christine Coutaud,

Septembre 2006

 

Février 2007 : Des nouvelles de ma classe

Les vacances approchant dans mon département, il est temps que je prenne un peu de recul et fasse mon bilan personnel…

Du point de vue de la maîtresse :

C’est toujours un challenge impressionnant de réfléchir en termes d’apprentissages échelonnés au moment de préparer ma classe, les idées pour constituer une progression graduée, accessible à tous et incluant les compétences à acquérir n’étant pas spontanées… Ce n’est pas que je manque d’idées 😉 c’est que j’ai encore du mal à les décliner en plusieurs niveaux de difficultés. Mais je perçois mieux la manière dont je dois définir mes objectifs pour que ceux ci soient tellement clairs pour les enfants qu’ils puissent d’eux-même expliciter la consigne et se l’auto-approprier.

Je me suis vite aperçue que les enfants ont toujours une oreille qui traîne, et que l’atelier échélonné que je mets en place peut au bout de quelques jours être complétement géré par les enfants eux-mêmes, les premiers à l’avoir accompli expliquant, corrigeant les autres.

Mon problème « annexe » est que je ne dispose pas d’une ATSEM à temps plein.
Autre problème, mes ateliers durent trop longtemps, je ne peux pas effectuer de seconde rotation, mes activités sont donc très probablement encore axées sur l’organisation de l’école élémentaire, sans doute faudra-t-il que je prépare plus « simple ».

Je n’arrive pas encore à établir de plan de travail (c’est sur ce point que je vais aussi travailler d’un point de vue pédagogique pour le reste de l’année) mais je suis quand même rassurée de voir que l’élan et la curiosité des enfants au début d’un atelier échelonné sont toujours aussi intenses.

Mes petites fiertés personnelles :

Les progrès réalisés par certains évidemment!

Le « climat » serein dans la classe, c’est impressionnant le calme (je n’ai pas dit le silence :)) dans une classe maternelle…

L’autonomie acquise par les enfants qui ont appris à se découvrir, à travailler ensemble, à comparer leurs productions, à s’inspirer des idées des uns et des autres, à s’écouter. Aucun « groupe » n’étant constitué, ils ont très vite pris l’habitude d’aller spontanément les uns avec les autres, à être constamment mélangés.
Du point de vue des élèves :

Laisser les enfants progresser à leur rythme donne des « résultats » très surprenants : les évaluations de janvier étant achevées, je me suis aperçue très surprise que sur 28 élèves, je n’en ai que 3 en « difficulté » : 1 parce qu’il est assez souvent absent, donc il perd logiquement le « fil », 2 à cause de « problèmes » extérieurs à l’école. Mais les dites difficultés ne sont pas insurmontables. ;)) Pour les autres, dont certains me posaient un peu souci, globalement TOUTES les notions sont acquises ou sur le point de l’être. Cela implique que certains ont accompli une progression fulgurante depuis septembre et pour d’autres c’est moins rapide, l’important est que les progrès aient été réalisés. Les évaluations proposées étant « normalisées » et non formatives comme je l’aurais souhaité, mais en innovant avec ce type de pédagogie il fallait absolument que je vérifie la conformité et l’adéquation des acquis avec les compétences nationales.

Du point de vue « extérieur » :

Il y a beaucoup de personnes qui ont circulé dans ma classe, avec ou sans moi d’ailleurs ;)) Directrice d’une école de quatre classes, une PE2 est présente tous les lundis; j’ai également été en stage pendant 4 semaines, remplacée par une autre PE2, et dernièrement, un autre enseignant était présent dans la classe avec moi… En démarrant cette pédagogie, c’est très difficile pour moi d’expliquer en quelques dizaines de minutes le fonctionnement de la classe. Pour les PE2 qui ont « pris » la classe, cela ressemble beaucoup à de la pédagogie Freinet. Pour le brigadier qui est venu avec moi dans la classe, la surprise est venue du fonctionnement très souple et qui a priori, lui semblait peu structurant et « cadré », de la liberté du choix des ateliers; il a également trouvé que les activités proposées étaient difficiles, puis avec une matinée seul dans la classe, il a constaté de lui-même le résultat.

C’est aussi très important pour moi de bénéficier de ces éclairages de collègues, jeunes ou expérimentés, cela me permet de mieux cibler les atouts et les inconvénients du dispositif, de mieux définir mes pratiques.

Et du point de vue des parents ?

Les parents, dans ce village, se connaissent tous, discutent beaucoup entre eux. Ma classe, 13 MS et 15 GS est la copie conforme de la classe de ma collègue, qui fonctionne de manière traditionnelle. Les interrogations légitimes des parents en début d’année, se font plus discrètes à présent. Les cahiers des enfants sont distribués à chaque fin de période, peut-être les parents ont-ils comparé les travaux des 2 classes…. et se sont rendus compte que les compétences à atteindre étaient les mêmes, et étaient acquises.

Bilan :

Je suis toujours dans la pratique des ateliers échelonnés, et je ne risque pas d’en changer, c’est une recherche pédagogique permanente mais une telle richesse dans les découvertes et apprentissages des enfants!!!

Christine Coutaud

MS/GS

École de St Julien Les Rosiers – Gard

Publié par

Christine

auteure de Maternailes.net

Une réflexion sur « Christine, en MS/GS »

  1. Ta réflexion est très pertinente. J’ai également constaté des difficultés de mise au calme après l’accueil.

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